J’ai envie de crier : “Mais regardez donc ! Regardez le mystère ! Il vous crève les yeux !”
Et personne ne voit. Personne que moi.
Les gens voient des couleurs, des ombres, des lumières, des formes. Ils voient (que sais-je ?) peut-être la toile et les clous du châssis. Et moi, je ne comprends pas qu’ils ne puissent deviner toute la détresse qui est là, sous les yeux, comme elle était à la guerre : la clameur, la mort, l’amour, la trahison, le mensonge et la peur. Et beaucoup plus encore que je ne puis dire, mais que je sais faire.
Je dis bien : je sais faire.
Date | Lieu et description |
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6 juin 2024 |
Du débarquement de Normandie à l’expressionnisme abstrait |
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De courage, Montlaur n’en a pas manqué pendant les années de guerre. À partir d’octobre 1939, il participa à de nombreux raids en Sarre allemande avec les Corps Francs, des unités de combat de type commandos. En mai-juin 1940, il lutta avec acharnement contre l’avance allemande au-delà de la honteuse armistice signée par Pétain et le régime nazi. Son courage est mentionné par le professeur Guy Vourc’h dans son hommage prononcé lors de l’enterrement de son ami en Normandie, le 13 août 1977 : « Je le vis arriver (note : à Londres) au début de 1943, et lui offris d’entrer dans les Commandos, version moderne de la cavalerie, arme des reconnaissances, des coups de main audacieux. Nous ne nous sommes plus quittés. Chef de groupe, puis chef de section, ensemble, avec le Commandant Keiffer, avec Lofi, Hattu, Chausse, Bégot, Wallerand, nous avons forgé cet instrument d’attaque qui devait avoir l’honneur d’être choisi pour débarquer le premier, ici-même, sur le sol de France. Tous les officiers de ma compagnie blessés, c’est lui qui en prit le commandement. Puis ce fut Flessingue et Walcheren. Blessé à mes côtés, il refuse de se laisser évacuer. Son courage touchait à l’insolence ; il était humiliant pour l’ennemi : sept citations et la Légion d’Honneur à 25 ans. »
En février 1977, à six mois de sa mort, Montlaur ne la craignait pas, celle-là, si proche de lui depuis si longtemps.
Publié le 15/05/2024 par Michael — Guerre
\ Le 19 novembre 1939
Ma chère Maman,
C’est mon portrait que je vous envoie aujourd’hui. Je ne sais ce que vous en penserez : pour ma part, je n’en suis pas mécontent. Et puis, c’est toujours mieux que rien, puisque je n’ai pas de photographie à vous donner. Évidemment, vous n’êtes pas habituée à mes moustaches et à ma coupe de cheveux un peu étrange : enfin, vous me reconnaîtrez peut-être.
Je n’ai pas grand chose à vous raconter puisque, comme vous le voyez, je trouve le temps de dessiner. A part cela, dormir et manger sont mes principales occupations.
Voulez-vous m’envoyer, avec ce que je vous ai demandé avant-hier, deux paires de chaussettes de laine et un flacon de Boldine.
Je vous quitte à la hâte pour donner ma lettre au Vaguemestre, s’il n’est déjà parti.
Mille tendresses, ma chère Maman, je vous embrasse de tout cœur.
Guy
Cette lettre correspond au portrait de GdM présenté ici. Il écrit à sa mère pour lui dire qu’il n’a pas grand chose à lui dire puisqu’il n’y a pas grand chose à faire à part peut-être dessiner et sûrement dormir et manger. Juste lui demander deux paires de chaussettes de laine (novembre dans la Sarre) et un flacon de Boldine…
Inutile pour lui de s’étendre sur les deux derniers mois et demi qu’il vient de passer depuis la déclaration de guerre avec les allemands. En (première) ligne et au corps à corps (francs). Il ne sait pas encore qu’il en a encore pour 5 ans, il n’a que 21 ans. Vous souvenez-vous de vos plus belles années, entre 20 et 25 ans ?
Pendant toutes ces années, les seules moments sublimes pour lui ont été les périodes de combat et les rares moments non moins sublimes où il était avec